Langue et Droit (Actes de Colloque international)

Pourquoi l’homme cherche-t-il à s’effacer jusqu’à laisser le texte parler et énoncer la loi sans la moindre allusion à un je-énonciateur; quelque démiurgique qu’il soit? Le texte juridique cultive un idéal de rationalité, qui exige que les faits, les preuves, les lois, les règlements se fondent en « texte » et sur le texte. Le texte devient ainsi loi, règlement, obligation, interdiction, etc., sans avoir besoin d’apporter la preuve qu’il est en droit de s’ériger en tant que tel. Même au niveau de la référence, le texte de droit se réfère à un autre texte, de même nature, et ayant un statut plus performant en raison de son insertion dans le système de référence des textes juridiques. De ce fait, les textes juridiques s’installent dans un réseau de référence textuelle, en se créant une assise autoritaire, dont profitent les uns et les autres des textes qui gravitent autour de la loi, portant sur sa définition, sa précision, son mode d’emploi, son champ d’application, ses limites, ses tenants et aboutissants. Le texte est ainsi une autorité, autorisée par le seul fait qu’elle est ancrée dans un système de textes autoritaires, appelé « droit ». Le texte est autorisé au nom de la loi, la loi qu’il énonce: mais ce rapport n’est-il pas une pure tautologie?