L’Éthique en question dans la critique et la création littéraires
L’Éthique en question dans la critique et la création littéraires, Tübingen, Narr/Francke/Attempto Verlag, (Œuvres & Critiques, XLV, 2), 2021, Avec un texte d’ouverture de Jean-Luc Nancy.
« Ma génération, reconnaît Antoine Compagnon [dans « Morales de Proust »], a donc été élevée, dressée contre la lecture éthique ou morale de la littérature, contre une vision de la littérature occidentale comme création et transmission de valeurs […] La fonction éthique de la littérature était déniée par la plupart des théoriciens ».
Partant de ce constat, ce volume explore les manières dont la création et la critique littéraires se sont réapproprié – ou non – cette fonction éthique. L’éthique considérée, non comme un ensemble de valeurs – concept éminemment instable, polysémique et fécond dès lors qu’il est envisagé sur le plan littéraire –, mais plutôt comme une réflexion suivie et argumentée sur ces valeurs qui devraient orienter nos actions en vue du « bien agir » dans la cité.
Cette ambiguïté fondamentale de la notion de valeur est à l’origine d’une tension, jamais parfaitement résolue, entre les critères idéologiques et les critères esthétiques. Ainsi, l’art et la littérature sont constamment soumis à une double évaluation, attentive, dans les œuvres, tantôt à leur valeur esthétique intrinsèque, tantôt à leur capacité de transmission d’un type particulier de valeurs.
C’est essentiellement sur ce second type de valeurs que les 15 contributions réunies ici et inaugurées par un texte de Jean-Luc Nancy, se focalisent. Ce « retour de la valeur » et, plus largement, de l’éthique, concerne aussi bien le domaine de la critique et de la théorie que celui de la création littéraire et artistique proprement dite : « Si l’écriture aujourd’hui s’est libérée, je crois que c’est d’un slogan, qui était qu’écrire est un art intransitif. La grande affaire de ces dix dernières années, ce n’est pas qu’on revienne à une écriture naïve, c’est qu’on ne mette plus l’accent sur le caractère autoréflexif de l’écriture » (Danielle Sallenave, « Entretien avec Georges Raillard et Paul Otchakovski-Laurens », 1990).
Cette réhabilitation de l’éthique, qui touche tous les genres, serait liée au retour remarquable sur le devant de la scène littéraire et philosophique d’une expression nouvelle du sujet (créateur et critique), d’un « nouveau lyrisme » ou d’un « lyrisme critique », résolument moderne, réflexif et ouvert à l’altérité, mais également à la promotion d’une fonction « poéthique » de la littérature et de la poésie, chère à l’écrivain Michel Deguy comme au théoricien Jean-Louis Dufays, pour qui la littérature vaut essentiellement par la part d’humanité qu’elle recèle et transmet.
Dès lors, serait-il possible de dater avec précision ce que Liesbeth Korthals Altes a excellemment appelé « le tournant éthique » (Liesbeth Korthals Altes, « Le tournant éthique dans la théorie littéraire : impasse ou ouverture ? », 1999)? Comment comprendre ce retour, sinon cette urgence, de l’éthique aujourd’hui, dans les domaines de la création et de la critique littéraires ? L’éthique serait-il réellement « le nom d’une nouvelle période de l’histoire littéraire, ou d’un nouveau courant, de ce par quoi on reconnaîtra la production (ou une certaine production) de notre époque » ? (Isabelle Daunais, « Éthique et littérature : à la recherche d’un monde protégé », 2010). Dans quelle mesure le souci de l’éthique serait-il devenu le prisme à travers lequel la littérature contemporaine s’emploie à fonder sa valeur, sa légitimité, voire sa littérarité ?
Que seraient au juste une littérature éthique et une critique éthique ? Par quels mécanismes, procédés et scénarii certaines œuvres font-elles signe vers une signification éthique?
Détails
- ISBN:
- Année: 2021
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- Edition: Œuvres et Critiques
- Format:
- Nombre de page: 216
- Langue: Français
- Genre:
- Sujet: